In Gold We Trust
Quand un soldat étasunien meurt au combat et qu’il va au paradis, il est récompensé, en arrivant, de 72 automobiles flambant neuves, bref, vierges.
Gaëtan Pelletier
In Gold We Trust
Quand un soldat étasunien meurt au combat et qu’il va au paradis, il est récompensé, en arrivant, de 72 automobiles flambant neuves, bref, vierges.
Gaëtan Pelletier
Publié dans États-Unis, FABLES MODERNES, RÉFLEXIONS, U.S.A
Tagué États-Unis, matérialisme, Religare, RELIGION
Image: Le vieil homme triste, de Van Gogh
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« Chers djihadistes, l’Occident s’achève en bermuda […] Craignez le courroux de l’homme en bermuda. Craignez la colère du consommateur, du voyageur, du touriste, du vacancier descendant de son camping-car ! Vous nous imaginez vautrés dans des plaisirs et des loisirs qui nous ont ramollis. Eh bien,nous lutterons comme des lions pour lprotéger notre ramollissement […]Chers djihadistes, nous triompherons de vous. Nous vaincrons parce que nous sommes les plus morts. »
Philippe Muray
La crise que nous traversons en ce début de millénaire va au-delà de l’économique, c’est une crise de valeurs qui remet en cause les fondements mêmes de cette civilisation marchande à l’agonie.. Les individus dédaignant toute transcendance religieuse et toute utopie se trouvent livrés à eux-mêmes, soumis au règne de l’éphémère. Leurs identités en perpétuelle redéfinition n’étant plus cadrées par un moule collectif deviennent volatiles. Cette identité éclatée née avec ce qu’on s’accorde à appeler la seconde modernité pousse l’individu à se chercher sans cesse de nouveaux repères. Chacun se crée son propre récit auquel il adhère et qui lui donne cet élan vital si nécessaire. Or cette quête permanente et ce flottement des repères sont si épuisants qu’ils se traduisent par ce que le sociologue Alain Ehrenberg nomme la fatigue d’être soi (1). Cette difficulté à se définir, à se donner un sens se traduit chez un bon nombre de personnes par un déficit de l’estime de soi. Une faille identitaire qui sera vite récupérée par le management. En effet, dans le monde du travail, c’est la performance qui vient combler ce vide existentiel. Des travailleurs totalement désolidarisés, ayant rompu tout lien avec le collectif entrent en compétition. Les plus fragiles, incapables de répondre aux exigences et aux normes imposées, sont systématiquement marginalisés et culpabilisés. Ce qui était traditionnellement vécu comme un rapport de force entre groupes sociaux est actuellement vécu comme une tare personnelle. Cette psychologisation de la vie sociale débouche sur ce que Claude Dubar (2) appelle des individualisations négatives. Des désespérés dont le nombre ne cesse de gonfler en ce temps de crise, totalement désorientés ayant perdu tout repère, plongent dans une angoisse existentielle insupportable conduisant souvent au suicide. Selon une étude faite par des chercheurs de l’université de Zurich, publiée par The Lancet Psychiatry, 45000 suicides dus au chômage ont lieu annuellement dans 63 pays. La mort physique se présente comme une concrétisation d’une mort sociale devenue insoutenable. Mais la haine de soi à vite fait de se muer en haine de l’autre. Qui ne se souvient de la tuerie de Nanterre survenue en 2002. Avant de commettre son forfait, Richard Durn écrit une lettre-testament dans laquelle il dit en substance ; « Je vais devenir un serial killer, un forcené qui tue. Pourquoi ? Parce que le frustré que je suis ne veut pas mourir seul, alors que j’ai eu une vie de merde, je veux me sentir une fois puissant et libre ». La mort, ultime remède, se présente comme un acte libérateur, une réminiscence en quelque sorte d’un idéal romantique morbide. Suicides et crimes de masse se multiplient de manière alarmante. Une tuerie de masse par jour aux États-Unis, plus de morts que par le terrorisme un affirme le Nouvel Observateur (3). D’après la chaîne de télévision NBC, 3.046 Américains sont morts dans des attaques terroristes entre 2001 et 2014, alors que pour la même periode 153.000 ont été victimes d’homicides commis gratuitement par des forcenés. Or les médias ne focalisent que sur les attentats terroristes islamistes, une manière comme une autre de conjurer magiquement le mal en l’imputant à une lointaine barbarie. Non, Thanatos est omniprésent, tapi dans le moindre recoin de nos êtres. Le massacre d’Oklahoma City en 1995 et celui d’Oslo en 2011, pour ne parler que de ceux-là, sont bien là pour nous rappeler qu’une folie meurtrière semble s’emparer sans distinction de l’ensemble de la planète. Ce déni de soi et du monde est la manifestation extrême d’une crise identitaire généralisée. De telles failles identitaires insupportables seront toutefois colmatées dans la précipitation par un mouvement régressif vers les origines. Régionalisme, confessionnalisme, ethnocentrisme sont autant de refuges illusoires où viennent s’engouffrer tous ces laissés pour compte d’un monde complètement déboussolé. L’éclatement est tel que les nations risquent à tout moment d’imploser, ébranlées par la multiplication des revendications séparatistes : écossais au Royaume-Uni, flamands en Belgique, catalans en Espagne, kurdes en Irak… Les clivages ne s’inscrivent plus dans une logique d’antagonisme de classes centré sur « l’avoir » (salaires/plus-value) mais dans une logique d’exclusion où l’affirmation de soi ne vaut que par la négation sinon l’élimination de l’autre en raison de son ethnie ou de sa confession. C’est dans cet ordre d’idées que des foyers néofascistes éclosent un peu partout en Europe Occidentale et en Europe de l’Est.
Dans le monde arabe, la crise identitaire est d’autant plus profonde qu’elle associe aux effets de l’hypermodernité un sentiment persistant d’humiliation lié à la décomposition et au dépeçage de l’Empire ottoman par les armées coloniales européennes. Les formations islamistes ont été au départ des mouvements de contestation luttant contre la sécularisation envahissante imposée par l’Occident colonial. Elles revendiquaient principalement le rétablissement du califat et de la juridiction de la Charia. Mais ce mouvement finira par être récupéré par l’empire naissant étasunien au nom d’une « sainte alliance » monothéiste contre un prétendu athéisme bolchevique. En1953, une délégation de notables musulmans est invitée aux États-Unis. Elle est reçue par le président Dwight Eisenhower. Celui-ci s’adresse à ses invités en ces termes : « notre foi en Dieu devrait nous donner un objectif commun : la lutte contre le communisme et son athéisme ». Saïd Ramadan, gendre de Hassan Al-Banna, fondateur du mouvement des « frères musulmans » faisait partie de la délégation. Il sera désormais l’acteur principal de la guerre d’usure menée contre le régime nassérien et contre tous les régimes et courants politiques progressistes du monde arabe. Mais l’embrigadement ne s’arrêta pas là. États-uniens et saoudiens s’emploieront à partir des années 70 à répandre l’extrémisme wahhabite partout dans le monde arabo-musulman. Du Pakistan au Maroc, écoles coraniques, associations caritatives, mosquées, chaînes de télévision se consacraient à coups de milliards de dollars à l’endoctrinement et au recrutement des jeunes djihadistes qui iraient se battre contre les soviétiques en Afghanistan, puis contre les serbes en Bosnie. Une stratégie qui s’avère payante. Une armée sous fausse bannière déterminée et fanatique a pu ainsi provoquer l’implosion de l’URSS et la mise au pas de la Serbie à moindre coût. Il n’en fallut pas plus pour qu’une pareille stratégie ne soit adoptée de manière systématique dans les guerres menées actuellement contre le monde arabe par les Etats-Unis et leurs vassaux. Après l’invasion de l’Irak et l’avènement du « printemps arabe », les djihadistes cessent de diriger leurs armes contre des ennemis extérieurs pour les retourner contre leurs propres pays, leurs propres populations. L’objectif des commanditaires ne se limite plus à ébranler les fondements d’un etat mais consiste à pousser ostensiblement des sociétés entières à l’autodestruction. Ce nouvel art de faire la guerre n’eût été possible sans la conjugaison d’un ensemble de facteurs qui ont aidé à sa mise en oeuvre. En effet, la radicalisation n’aurait jamais atteint de nos jours une telle ampleur n’étant le mal existentiel endémique qui frappe une partie de la jeunesse mondiale associé au développement vertigineux des moyens de communication. A l’opposé des djihadistes des annees 80, formés idéologiquement et militairement, aujourd’hui des jeunes de tout bord se radicalisent en quelques jours, en privé, hypnotisés par leurs écrans. Leur rapide conversion ne se fonde que sur quelques rudiments religieux ; une génération spontanée de terroristes que favorise le terreau fertile des réseaux sociaux sur internet. Le psychanalyste Fethi Benslama (4) pense que les analyses sociologiques globalisantes ne sont pas en mesure de rendre tout à fait compte de la complexité d’un tel phénomène. Il précise que les recruteurs ciblent principalement des jeunes dépressifs souffrant d’un profond déficit narcissique. L’offre de radicalisation, car c’est bien une offre, propose à ces derniers une mission héroïque au service d’une cause sacrée, leurs failles sont alors colmatées comme par magie. Armés d’une pareille prothèse identitaire, ils franchissent le Rubicon… Or, ce vernis islamique dont se griment toutes ces âmes perdues a vite fait de s’écailler, laissant transparaître la pulsion de mort qui n’a cessé de les tourmenter. Le chant de sirène des gourous de la secte wahhabite n’a fait en réalité que décupler leur haine de soi et du monde. Des dizaines de milliers de combattants mi-mercenaires mi-fanatiques venus de plus de quatre-vingt pays dévastent depuis 2011 la partie la moins conciliante du monde arabe. Déferlant de tous les coins et recoins de la planète, de langues et de cultures différentes, ils sont mus par un furieux désir de sacrifice. La mort de soi et des autres se présente comme l’ultime réponse à l’inanité de leur existence. Ce culte de la mort est essentiellement l’expression d’un nihilisme hypermoderne. Selon Bernard Stiegler, cette vague de haine qui secoue le monde est à mettre sur le compte de la disruption (5). Celle-ci consiste en une rupture brutale provoquée par le rythme insoutenable des innovations apportées par les nouvelles technologies. En effet, à chaque fois que dans l’histoire s’opère une révolution technologique, elle s’accompagne de sérieux bouleversements sociaux. Le World Wide Web avec son milliard de sites internet, ses cinq milliards de smartphones et ses réseaux sociaux vient parachever le travail de désindividuation et de massification entamé depuis quelque décennies par le cinéma et la télévision. C’est dans ce Far West virtuel que le capital, complètement désinhibé, va élire domicile, piétinant sans vergogne les règles sociales les plus élémentaires. Envoûté par ses fétiches évanescents, infantilisé, uniformisé, grégaire, l’individu croule sous le poids d’une double faillite économique et symbolique. Stimulé par un marketing de plus en plus agressif qui vise son inconscient, il s’oriente vers toujours plus de consommation compulsive. La libido en tant que mécanisme de sublimation et donc d’investissement social cède la place à l’hégémonie des pulsions. C’est ce processus de désublimation qui plonge ainsi le sujet contemporain dans les illusions d’une immédiateté pulsionnelle balançant entre manque et ennui. Tout se passe en effet comme si le consommateur cherchait désespérément à combler une béance qui ne cesse de s’approfondir. Une totale addiction qui finit par tuer le désir . Il n’y a rien de plus dangereux que la destruction du désir affirme Bernard Stiegler : c’est la psychose comme fait social massif. Des gens qui souffrent de leur désir, c’est la névrose, des gens qui souffrent de ne plus avoir de désir, c’est la psychose. C’est aujourd’hui un phénomène mondial et de masse, compensé par l’hyperconsommation. Plus cette consommation addictive compense la perte de désir, plus elle entretient cette perte. Un cercle vicieux qui conduit de plus en plus de gens à un total désespoir. Quand l’immédiateté pulsionnelle exclue toute forme d’investissement social que permet la libido, elle ouvre la voie à la pulsion de mort. Quand il n’y a plus rien, ni modèle politique, ni utopie, ni espoir, ni solution, et que les représentations du possible s’arrêtent, on s’achemine inéluctablement vers la destruction de soi et des autres. Comment expliquer sinon cette obsession du suicide et du massacre qui caractérise notre époque ? Quand le norvégien Adreas Bri trucide de sang froid 76 jeunes, quand l’allemand Andreas Lubitz s’écrase avec son avion entraînant avec lui la mort de 149 personnes, quand un sexagénaire américain se donne la mort après avoir ,massacré à Las Vegas une soixantaine de ses compatriotes et en avoir blessé plus de cinq cents, quand les tueries perpétrés par l’armée birmane provoquent l’exode massif de la minorité musulmane des Rohingya, quand de jeunes européens de souche ou d’origine maghrébine se transforment soudainement en coupeurs de têtes, on est frappé par la convergence des obsessions mortifères qui animent des gens aussi différents. Cette hantise morbide de l’épuration vise non seulement l’ethnique et le confessionnel, mais cible l’ensemble de la société et prend l’allure d’une guerre de tous contre tous. Cette aspiration à la destruction de tout, autant par haine de l’autre que par dégoût de soi ne peut avoir pour nom que le nihilisme.
Ce désespoir généralisé, reflet d’un monde en plein désordre économique, social et symbolique marque l’échec cuisant de l’idéologie du progrès et de l’économie néolibérale (7). Nous nous trouvons aujourd’hui pris dans le tourbillon d’une crise du sens où tous les repères semblent perdus. La mise à mort du salariat due à l’introduction des nouvelles technologies dans les circuits de production pousse des masses de plus en plus importantes de chômeurs au désespoir le plus total. En même temps, face à la réduction de leur part de la plus-value, les investisseurs préfèrent se tourner vers la spéculation financière. Ils ne font en fait qu’ajourner la crise par toutes sortes de subterfuges qu’offre l’économie fictive. Incapable de reconnaître sa stérilité, le capital invente la chimère du crédit et de l’endettement, s’adonnant ainsi à une autophagie délirante. La crise de 2008 n’a finalement servi à rien et l’automate poursuit malgré tout sa course insensée. A l’anomie hypermoderne de ce début de siècle répond le nihilisme dévastateur de tous ces laissés pour compte d’un ultraliberalisme de plus en plus envahissant. Ainsi nihilisme et néolibéralisme ne cessent de soumettre le monde à leur furie anomique. Cette descente aux enfers devient d’autant plus préoccupante lorsque de toute part, des scientifiques affirment que la Terre est entrée depuis un bon moment dans une nouvelle ère géologique : l’anthropocène. En effet, l’homme a modifié son environnement à un point où il ne lui serait prochainement plus possible de survivre. Or, selon le sociologue Andeas Malm, ce ne serait pas l’activité humaine en soi qui menace de détruire notre planète, mais bien l’activité humaine telle que mise en forme par le mode de production capitaliste. Nous ne serions donc pas à « l’âge de l’homme » comme le sous-tend le concept d’Anthropocène, mais bien à « l’âge du capital » (8). Pour de nombreux spécialistes, l’humanité doit impérativement sortir au plus vite du capitalocène, si elle tient à sa pérennité.
Face à toutes ces impasses, le monde s’engage dans un mouvement régressif généralisé. C’est comme si depuis l’implosion de l’URSS la nature reprenait tous ses droits. Le dépérissement de l’tat-Providence et le retour progressif du capitalisme sauvage du 19ème siècle constituent une tentative désespérée de remettre sur pied une économie de marché chancelante. Le démantèlement de la Yougoslavie pendant les années quatre vingt dix ouvre un nouveau cycle de guerres sanglantes mettant à feu et à sang les Balkans, l’Afghanistan, l’Irak, la Libye, la Syrie, le Yemen et le reste suivra probablement… Le dépeçage de l’ex-URSS a permis de son côté l’encerclement de la Russie alors que les intrusions de plus en plus hasardeuses, de plus en plus risquées de l’armée américaine en mer de Chine méridionale visent l’étranglement de l’Empire du Milieu. Une ruée vers l’Est qui s’inscrit dans la continuité des 200 guerres livrées depuis 1945 par l’Occident afin de maintenir son hégémonie sur l’ensemble planétaire avec près de 41 millions de morts et des centaines de millions de blessés et de déplacés. Cette ruée vers l’Est fait penser aux théories géopolitiques d’un Mackinder ou d’un Spykman, le premier croyait que celui qui contrôlerait le Heartland (l’Eurasie) dominerait le monde, le second pensait au contraire que le contrôle du Rimland (Europe Occidentale, Moyen Orient, Chine) permettrait cette domination. Si Hitler en envahissant l’Union Soviétique pendant la deuxième guerre mondiale s’inspirait de la théorie de Mackinder, Roosevelt adhérait quant à lui à la thèse de Spykman. Les stratèges états-uniens actuels, plus gourmands, visent à la fois le Heartland et le Rimland. Une pareille fureur expansionniste s’inscrit dans le continuum historique d’une modernité conquérante dont les Lumières ne cessent depuis deux siècles d’embraser le monde.
En ce début de millénaire une guerre mondiale qui ne dit pas son nom est en train de ravager le Moyen-Orient. Alors que les guerres inter-étatiques européennes avaient pour objectif la consolidation des États-Nations, les conflits intraétatiques actuels visent au contraire la dislocation des nations. Des guerres fratricides déchirent depuis des années des régions entières de l’Asie et de l’Afrique. En Europe, après l’implosion de l’URSS et de la Yougoslavie le phénomène semble toucher même des pays occidentaux tels que l’Espagne ou encore l’Ecosse. L’État-Nation que Hegel plaçait au summum de l’Histoire serait-il donc tombé en désuétude sous les coups de boutoir de la mondialisation ? Il faut dire que la globalisation d’un côté et le dépérissement de l’État-Providence de l’autre ont fini par ébranler ce modèle politique. Or, pour le politologue J. F. Bayart (9) croire que les États-Nations sont de plus en plus repliés sur eux-mêmes, se désagrégeant face à une mondialisation envahissante n’est que pure illusion. Au contraire, depuis deux siècles les États-Nations ne font que proliférer au fur et à mesure de l’extension du marché mondial. Cette universalisation de l’état-nation résulte de la décomposition de l’empire austro-hongrois, de l’empire ottoman ainsi que des empires coloniaux britannique et français. Le passage d’un monde d’empires tolérant la diversité à un système international d’états-nations imposant aux peuples l’unité culturelle a complètement bouleversé les relations internationales. Du Printemps des Peuples au 19ème siècle au Printemps Arabe actuel, la globalisation se présente comme une triangulation entre trois processus synergiques : l’intégration d’un certain nombre de marchés, l’universalisation de l’état-nation et la montée des identitarismes. L’État n’est nullement la victime de la globalisation, il en est plutôt le produit et l’outil répressif, la définition ethno-confessionnelle de la citoyenneté dont la purification ethnique est le mode opératoire en est l’expression idéologique majeure. Bayart qualifie cette triangulation de matrice nationale-libérale, nationale pour le petit peuple, libérale pour les riches. C’est au moyen d’un tel oxymore que les élites réussissent à mystifier et à manipuler les masses en exaltant leurs fantasmes identitaires. Tel était le cas du peuple allemand sous le règne du national-socialisme. Fragilisés par leur ethnocentrisme séculaire, abusés par une Armada de médias-mensonges, une partie de plus en plus importante des peuples occidentaux se laisse encore une fois prendre au piège. Après un répit de quelques décennies marquées par des clivages sociaux et politiques autour de valeurs de liberté et d’égalité, voilà que ressurgissent les vieux démons du fascisme. Pour l’historien Enzo Traverso, les nouveaux visages du fascisme sont une réponse régressive dans un monde désenchanté en panne d’utopies, qui se nourrit de promesses fantasmées d’un passé mythifié. C’est selon cette logique que Sionisme chrétien, sionisme religieux juif et wahhabisme ne cessent depuis des décennies d’incarner cette régression mythifiée en promouvant l’idéologie de la fin des temps. De plus en plus d’adeptes de l’eschatologie ont tendance à se considérer comme le dernier bastion des témoins de Dieu dans une humanité en perdition. Seul le retour du Messie est en mesure de faire régner la paix et la prospérité une fois le monde purifié du mal qui l’habite. C’est ainsi que sortis tout droit des Écritures, les cavaliers de l’apocalypse s’emparent avec fracas du réel et partent chacun de son coté à la chasse de son antéchrist. Si les sionistes juifs et chrétiens s’emploient depuis plusieurs décennies à vider La Palestine de ses habitants pour créer leur « Terre Promise », Daech et ses avatars massacrent de leur côté irakiens, syriens, yéménites et libyens pour préparer à l’avènement de l’apocalypse. L’idéologie de l’épuration ethnoreligieuse s’empare par ailleurs des néo-fascistes européens qui font du musulman leur bouc émissaire du moment. On est en réalité en présence d’une sorte de front uni sioniste-wahhabite-néo-fasciste qui vise tout simplement la dislocation du monde arabe, les quelques attentats perpétrés en Europe ne sont là que pour mieux brouiller les pistes et susciter la peur. Cette stratégie du chaos que l’Occident n’a cessé d’asseoir semble aujourd’hui atteindre son point culminant. En effet, le catastrophisme apocalyptique ne cesse de prendre de l’ampleur avec la montée en puissance de la nébuleuse évangélique. C’est la religion qui connaît la plus forte progression dans le monde. Le nombre des adeptes dépasse actuellement le demi-milliard. Dans un pays comme la France, les évangéliques sont passés de 50 000 fidèles en 1950 à 600 000 aujourd’hui. Prosélytes, ils n’hésitent pas à utiliser les techniques du marketing pour convaincre, leurs cultes aux allures de show galvanisent la foule et rapprochent des gens qui fuient leur solitude et leur vide existentiel. Le phénomène semble gagner le monde entier et s’implante même dans des contrées lointaines telles que l’Afrique, le Moyen-Orient, la Chine et l’Inde, si bien que certains penseurs n’hésitent pas à parler d’un réenchantement du monde. Or, lorsqu’on y regarde de plus près, on s’aperçoit que cette communion avec l’Eternel à travers la musique, la danse et la fraternité joyeuse n’est là que pour mieux cacher la nature ô combien sombre de ce courant religieux. Un prosélytisme virulent anime cette secte pressée d’évangéliser le maximum d’humains avant la bataille finale d’Armageddon. Après avoir eu raison des théologiens de la libération en Amérique latine, les évangéliques conduisent aujourd’hui une double offensive contre les catholiques et contre les musulmans. Ils fournissent désormais le principal encadrement politique aux États-Unis et étendent leur influence dans le monde via leur armada de missionnaires. Une véritable multinationale de la manipulation religieuse qui en tant que telle développe des stratégies de marketing et de conquête. L’instrumentalisation de l’évangélisme au côté du wahhabisme constitue actuellement l’élément central de la politique étasunienne au Proche-Orient. Les médias occidentaux qui ne cessent d’accuser les islamistes de tous les maux, restent absolument discrets sur les agissements sordides des missionnaires évangéliques dans le monde arabe. Les évangéliques, qui s’inscrivent dans le mouvement des Chrétiens sionistes, prétendent que la création d’Israel est l’accomplissement de la prophétie biblique annonçant le retour du Messie. Ils se donnent ainsi pour mission l’épuration ethno-confessionnelle de la Palestine historique pour la repeupler de juifs ramenés des quatre coins de la planète à coups de milliards de dollars. Pour ces adeptes de la fin des temps il n’y a ni solution à deux États, ni même l’ombre d’un palestinien foulant leur prétendue « Terre Promise ». Ils continuent au mépris de tous d’injecter des sommes colossales pour poursuivre la colonisation de la Cisjordanie. Leurs tentatives d’évangélisation du monde arabe vise en particulier les minorités chrétiennes mais aussi certaines communautés musulmanes dont les origines ethniques pourraient servir à des projets sécessionnistes et anti-arabes : c’est le cas avec les kurdes d’Irak et de Syrie, mais aussi avec les Kabyles et les Berbères en Algérie et au Maroc. Bien entendu, cette action de prétendue évangélisation encouragée, financée et protégée par le gouvernement de Washington, ne vise en réalité que la déstabilisation et l’affaiblissement des pays arabes. Ainsi derrière ce rideau de fumée fait d’émotions, de miracles et d’exorcisme, le messianisme des évangéliques ne cesse de prospérer, multipliant le nombre de ses adeptes, tous ces laissés pour compte d’un néolibéralisme. en plein délire.
En ces temps du réenchantement factice, messianisme kabbalistique et évangélisme, tous les deux apocalyptiques, s’en vont en guerre contre arabes et musulmans pour hâter la venue du Messie. Il faut cependant préciser qu’au moment de la création d’Israel, le sionisme était politique, c’est seulement après la guerre des 6 jours que le sionisme religieux juif, en sommeil depuis le début du 19ème siècle, s’est subitement réveillé entraînant à sa suite l’éveil du sionisme chrétien. C’est ainsi que pendant le premier congrès sioniste chrétien qui a eu lieu à Bâle en 1985, 600 délégués chrétiens de vingt pays différents ont appelé à reconnaître l’aspect prophétique de la création de l’état d’Israel. Le congrès a appelé par ailleurs à reconnaître Jérusalem comme ville éternelle offerte par Dieu au peuple juif. Ainsi fut scellée la sainte alliance des deux peuples élus, annonçant le commencement de la nouvelle ère judéo-chrétienne. Aujourd’hui, l’AIPAC et les églises évangéliques sont si puissants qu’ils tiennent toute la classe politique étasunienne en otage. La situation est telle qu’on finit par se demander si vraiment on a affaire à une démocratie ou alors à une théocratie déguisée. À partir des années soixante-dix le poids de l’électorat évangélique est tel que des présidents comme Reagan, Bush ou alors Trump n’auraient jamais atteint la magistrature suprême sans le soutien de ce mouvement sioniste chrétien. Reconnaissant ou alors par crainte, défiant le monde entier, Trump reconnaît Jérusalem comme capitale éternelle de l’état d’Israel ! Et pourquoi pas comme capitale planétaire du nouvel ordre mondial comme le propose Jacques Attali ! Comme pour narguer les palestiniens, le président étasunien choisit de transférer son ambassade à Jérusalem le 14 mai, jour anniversaire de la Nakba. Et pour fêter l’heureux événement, la soldatesque sioniste s’est amusée à tirer comme des lapins de jeunes manifestants à Gaza, tuant plus de soixante personnes et blessant plus de 2700. Un vrai carnage ! Il faut dire que depuis plus de trente ans, la géopolitique occidentale semble s’embourber jusqu’au cou dans les mythes messianiques. Le choc de civilisations n’est en fait que la concrétisation des prophéties messianiques où sionistes juifs et sionistes chrétiens tiennent le beau rôle. Il ne reste alors qu’à donner corps à l’antéchrist. C’est le wahhabisme, cette hérésie schismatique devenue l’idéologie des égorgeurs de Daech qui a été choisi pour remplir cette sale tâche. Sa mission principale est d’éclabousser l’islam. Depuis les années soixante-dix, des troupes wahhabites formées, encadrées, financées et armées par les Etats-Unis et leurs vassaux du Golf constituent l’armée sous fausse bannière qui a servi à précipiter la chute de l’Union Soviétique et qui ne cesse de dévaster depuis 2011 l’Irak, la Libye, la Syrie et le Yemen. Le wahhabisme qui a enfanté les Ikhwan,vAl-qaïda et Daech n’est pas un simple rigorisme ni un puritanisme ni même une pétrification de la foi musulmane, mais une dogmatique exclusiviste, dénué de toute spiritualité, qui fait de la violence une dimension structurelle. Ceux qui s’écartent de la doctrine sont accusés soit de mécréance soit d’apostasie, donc passible de mort. Cette idéologie rappelle à bien des égards la réforme protestante. Cromwell, au 17ème siècle, l’Ancien Testament à la main, massacrait catholiques irlandais et écossais, détruit les églises et assassine les prélarts pour imposer sa nouvelle religion. Les deux courants se rejoignent par ailleurs sur un certain nombre de croyances : littéralité du texte sacré, iconoclasme, destruction des vestiges, rejet des traditions et même des institutions. Le wahhabisme tout comme le protestantisme s’inscrivent sans doute dans ces soubresauts que connaît l’humanité à chaque fois qu’elle se trouve confrontée à une crise de sens. L’idéologie wahhabite, loin d’être une radicalisation de l’islam, en est au contraire la négation. Ce violent mouvement nihiliste religieux a été instrumentalisé par les britanniques pour mener une guerre d’usure contre un empire ottoman à l’agonie. Les wahhabites passeront ensuite sous contrôle étasunien à la fin de la première guerre mondiale avec la création de l’état arabe-saoudien.
Djihadistes, c’est avec ce qualificatif que les occidentaux gratifiaient les wahhabites pendant la guerre sovieto-afghane. Aujourd’hui, ces mêmes wahhabites sont chargés de tout une autre mission, celle de dévaster à la fois le monde arabe et de pervertir l’image que le monde occidental se fait de l’Islam, une image déjà suffisamment ternie par plus d’un siècle de colonisation et par les fantasmes dégradants des orientalistes. C’est ainsi que les preux djihadistes se sont subitement métamorphosés en criminels pervers : lapidations, décapitations, immolations par le feu, égorgements…autant de raffinements puisés dans leur livre de chevet : « La gestion de la barbarie ». Voilà que se concrétise enfin ce fameux choc des civilisations : d’un côté une armée de tueurs sous fausse bannière islamique, de l’autre toute l’armada médiatique que les puissances occidentales ont consacrée au dénigrement et à la diabolisation de l’Islam. Or, pour le politologue Olivier Roy (10), toute cette cruauté n’est nullement la conséquence d’une radicalisation de l’Islam comme on le laisse souvent entendre mais plutôt d’une islamisation de la radicalité. Victimes d’un nihilisme générationnel, des jeunes en rupture totale avec leurs familles et leur milieu, souffrent de ce que l’historien François Hartog (11) nomme le Présentisme, ce régime d’historicité qui abolit tout lien avec le passé et toute projection dans le futur, enfermant ainsi l’individu dans un présent sans issue. Face à un monde stérile, incapable de produire du sens, de plus en plus de jeunes plongent dans un nihilisme destructeur. Des crimes insensés ponctuent notre quotidien un peu partout sur la planète. Lorsqu’on regarde du côté des États-Unis, on est frappé par la fréquence des crimes de masse qui ensanglantent ce pays. Des attentats tout aussi absurdes qu’odieux visent écoles, universités, boîtes de nuit… mais que les médias ont vite fait de jeter dans les oubliettes des faits divers. A ce nihilisme générationnel fait écho un nihilisme encore plus destructeur, le nihilisme millénariste. C’est parmi les nihilistes générationnels que les sectes sioniste, évangélique et wahhabite, toutes millénaristes, viennent recruter leurs adeptes. DAECH, devenu EI (Etat Islamique) n’a en fait rien d’un état et rien d’islamique, ce n’est qu’un conglomérat de mercenaires et de nihilistes qui pensent que leur propre mort est un signe avant-coureur de l’apocalypse, un présage de la fin des temps. Fasciné par la mort de soi et des autres, l’EI n’est pas comme l’insinuent les médias occidentaux, un projet de restauration du califat mais une entreprise de démolition, d’anéantissement du monde arabe simplement parce qu’il s’est trouvé là où il ne fallait pas, tout comme d’ailleurs les peaux rouges ou encore les aborigènes … Mais ne dit-on pas que l’arrivée du Machiah sera nécessairement précédée des douleurs de l’enfantement ! Il semble que la fin des grands récits a complètement déboussolé une humanité qui n’a rien trouvé d’autre que de replonger dans les profondeurs abyssales de ses mythes. Nous voilà donc témoins de la renaissance de l’homme véritable longtemps enfoui sous la modernité, un homme rendu à son essence première d’Homo religiosus comme le souligne Georges Corm (12). L’identitarisme ethno-confessionnel, plutôt ethnique avec le national-socialisme, vire actuellement au confessionnel avec le national-libéralisme. En instrumentalisant des sectes extrémistes, apocalyptiques, tous ces marchands d’illusions identitaires seront les premiers surpris par l’ampleur catastrophique de leur choc des civilisations. Si pendant la deuxième guerre mondiale les russes ont mis fin à la démence nazie, qui saura arrêter aujourd’hui cette folie messianique qui incendie le monde arabe mais qui ne manquera pas de s’étendre. Les risques d’une déflagration généralisée sont grands surtout lorsqu’on sait qu’ Israël, dirigé par des sionistes religieux fanatiques, est en possession de plus de 150 bombes nucléaires et de 6 sous-marins nucléaires.
Le vieux monde se meurt, le nouveau monde tarde à apparaitre, et dans ce clair-obscur surgissent les monstres disait Gramsci. Or avec des Donald Trump, des John Bolton, des Mike Pompéo ce nouveau monde risque bien de ne jamais voir le jour. En moins de deux ans de pouvoir le président étasunien a quitté de manière unilatérale des accords internationaux relatifs au climat, au commerce, au nucléaire iranien ou encore au statut de Jerusalem, mettant ainsi en péril le fragile équilibre mondial. Trump n’est au fait ni un original ni un déviant comme on peut l’imaginer, il s’inscrit plutôt dans le continuum de cette stratégie du choc qui a fait les beaux jours du néolibéralisme et qui atteint aujourd’hui son stade ultime. Les Etats-Unis qui ne cessent de fantasmer à propos de leur empire unipolaire ne sont en réalité qu’un état-nation, un gros état-nation qui se débat dans ses contradictions d’état-nation et qui possède suffisamment de force et de violence pour dominer et pour détruire mais rien pour rassembler.
Fethi Gharbi
1) Alain Ehrenberg , La fatigue d’être soi. Dépression et société.
2) Claude Dubar : La crise des identités
4) Fethi Benslama : Un furieux désir de sacrifice
5) Bernard Stiegler : Dans la disruption, comment ne pas devenir fou!
6) Grandeur thermodynamique exprimant le degré de désordre de la matière
7) voir l’article : De l’art de gouuverner le monde https://www.legrandsoir.info/de-l-art-de-gouverner-le-monde.html
8) http://revuelespritlibre.org/anthropocene-ou-capitalocene-quelques-pistes-de-reflexion
9) Jean François Bayart : L’immpasse national-libérale
10) Olivier Roy : Le Djihâd et la mort
11) François Hartog : Régimes d’historicité. Présentisme et expériences du temps
12) Georges Corm : La question religieuse au XXI ème siècle
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Fethi Gharbi
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Le vieux monde se meurt, le nouveau monde tarde à apparaître et dans ce clair-obscur surgissent les monstres.
Antonio Gramsci
Nous sommes les témoins et les acteurs d’une époque charnière caractérisée par l’éclipse des repères et par l’éfritement des échelles de valeurs. C’est ce vide insupportable régi par le chaos que viennent investir avec la violence d’un ouragan les obsessions mortifères de tous ces hallucinés de la pureté originelle. Nous vivons en effet une drôle d’époque où les tenants du néolibéralisme le plus sauvage se détournent des pseudo-valeurs décrépites de l’idéologie libérale et s’appuient de plus en plus sur les fanatismes religieux devenus plus porteurs, donc plus propices aux manipulations. Mais cette alliance apparemment contre-nature ne constitue en fait qu’un paradoxe formel. Comme le souligne Marc Luyckx Ghisi, l’intégrisme religieux est ce sacré de séparation qui impose à l’homme de dédaigner son vécu pour retrouver le chemin de dieu. Dans le même ordre d’idées, la modernité, avec toutes ses nuances idéologiques, n’a cessé pendant voila plus de deux siècles de déconnecter totalement l’homme de sa place dans le monde en le soumettant aux pulsions d’un ego inassouvissable. Deux visions du monde, diamétralement opposées mais qui se rejoignent en déniant à l’homme sa véritable identité, cette dimension duelle, tout à la fois matérielle et spirituelle, seule en mesure d’assurer à notre espèce un équilibre salvateur.
Le rouleau compresseur néolibéral qui a entamé depuis 1973 sa course macabre au Chili puis en Argentine n’a épargné ni la population britannique sous Thatcher ni américaine sous Reagan et a fini par écrabouiller l’économie de l’ensemble du bloc communiste. Avec l’invasion de l’Afghanistan et de l’Irak, l’hystérie reprend de plus belle et tente non seulement de mettre la main sur les ressources naturelles mais de disloquer irrémédiablement le tissu social et d’anéantir les états de ces pays. Voilà qu’aujourd’hui, tous ces peuples révoltés du Maghreb et du Proche Orient s’éveillant de leur euphorie, se retrouvent eux aussi pris dans le pire des cauchemars : Les chicago-boys islamistes assaisonnés à la sauce friedmanienne poussent à la vitesse d’une Caulerpa taxifolia et envahissent soudainement l’espace sous le soleil revivifiant du printemps arabe. Un tel enchainement de violences a retenu l’attention de la journaliste canadienne Noami Klein qui en 2007 écrit “la strategie du choc” et s’inscrit ainsi en faux contre la pensée ultralibérale de Milton Friedman et de son école, “l’école de Chicago”. Noami Klein s’est probablement inspirée, pour mieux le contester, du leitmotiv friedmanien “thérapie” ou encore “traitement” de choc. Cela n’est pas sans nous rappeler la crise économique de 1929 qui sans laquelle Roosevelt ne serait jamais parvenu à imposer le New Deal à l’establishment de l’époque. C’est donc à la faveur d’une crise que le keynésianisme à pu s’installer au sein d’une société ultralibérale. S’inspirant probablement de ce schéma, Friedman a pensé que seuls les moments de crises aiguës, réelles ou provoquées, étaient en mesure de bouleverser l’ordre établi et de réorienter l’humanité dans le sens voulu par l’élite.
C’est donc à partir des années soixante dix que selon la thèse de Noami Klein le monde s’installe dans ce qu’elle appelle « le capitalisme du désastre ». Cataclysmes naturels ou guerres sont autant de chocs permettant d’inhiber les résistances et d’imposer les dérégulations néolibérales. La stratégie du choc s’appuie tout d’abord sur une violente agression armée, Shock and Awe ou choc et effroi, servant à priver l’adversaire de toute capacité à agir et à réagir; elle est suivie immédiatement par un traitement de choc économique visant un ajustement structurel radical. Ceux du camp ennemi qui continuent de résister sont réprimés de la manière la plus abominable. Cette politique de la terreur sévit depuis voilà quarante ans et se répand un peu partout dans un monde endiablé par l’hystérie néolibérale. Des juntes argentine et chilienne des années soixante dix en passant par la place Tiananmen en 1989, à la décision de Boris Eltsine de bonbarder son propre parlement en 1993, sans oublier la guerre des Malouines provoquée par Thatcher ni le bombardement de Belgrade perpetré par l’OTAN, ce sont là autant de thérapies de choc necessaires à l’instauration de la libre circulation du capital. Mais avec l’attentat du 11 septembre 2001, l’empire venait de franchir un nouveau palier dans la gestion de l’horreur. Susan Lindauer, ex-agent de la C I A (1) affirme Dans son livre Extreme Prejudice que le gouvernement des Etats Unis connaissait des mois à l’avance les menaces d’attentats sur le World Trade Center. Elle ajoute que les tours ont été détruites en réalité au moyen de bombes thermite acheminées par des camionnettes quelques jours avant les attentats. Le traitement de choc ne se limitait plus à susciter l’effroi dans le camp ennemi mais aussi dans son propre camp dans le but de terroriser sa propre population et de lui imposer les nouvelles règles du jeu. C’est ainsi qu’en un tour de main furent votées les lois liberticides du Patriot Act et les budgets nécessaires à l’invasion de l’Afghanistan et de l’Irak.
Cependant, Quarante ans de pratique de la dérégulation n’ont pu dynamiser l’économie mondiale et la dégager du marasme dans lequel s’est englué le capitalisme productif. Mais cherche-t-on vraiment à dynamiser quoi que ce soit?! La financiarisation de l’économie au lieu d’être la panacée tant escomptée a au contraire plongé le monde dans une crise systémique couronnée par le fiasco retentissant de 2008. Cette domination de la finance libéralisée a démontré en définitive que les marchés sont incapables de s’autoréguler. La crise a prouvé par ailleurs que la financiarisation n’est en fait qu’une dépravation de l’idée d’investissement, de projet, de projection dans l’avenir qui a toujours caractérisé le capitalisme productif. Ce qui se pratique aujourd’hui c’est essentiellement une économie usuraire, obsédée par l’immédiateté du profit et convaincue du fait que l’argent rapporte à lui seul et sans délai de d’argent. C’est donc dans ce tourbillon de l’autoreproduction du capital que le monde se trouve pris. Le néolibéralisme n’est en fin de compte qu’une vaste opération spéculative visant le transfert massif des richesses vers une grande bourgeoisie atteinte de thésaurisation compulsive, obnubilée par ses pulsions de destruction, ayant perdu définitivement la foi dans l’avenir.
L’agonie du capitalisme productif s’accompagne d’une déliquescence du politique. En effet, après la sécularisation du religieux, il semble aujourd’hui que c’est au tour du politique de subir le même sort. C’est bien en effet depuis le 19ème siècle que le politique s’est emparé progressivement de la gestion du sacré. L’État a fini par exiger de ses sujets la même allégeance que l’Église imposait à ses fidèles. La citoyenneté et la nation sont sacralisés et la patrie va jusqu’à exiger de l’individu le don de sa vie. Le vingtième siècle a été le témoin de ces “religions séculières” qui ont fait du politique un objet de foi et le fascisme a été la forme exacerbée de ce culte voué au politique. Mais avec l’effondrement du communisme et du keynesianisme l’institution politique commence à s’ébrècher et semble complètement se déliter de nos jours. Les prérogatives de l’Etat se réduisent comme une peau de chagrin et le politique a fini par être totalement vassalisé par l’économique. En effet, l’Etat n’a pour fonctions aujourd’hui que de promouvoir l’économique et d’assurer sa sécurité, encore que dans un pays comme les États Unis une bonne partie de l’armée soit tombée entre les mains de sociétés privées. Ainsi, les derniers remparts contre la déferlante subjectiviste viennent de s’écrouler et la mort de l’ État en sonnant le glas des transcendances annonce le triomphe insolent d’une modernité ayant atteint son faîte.
L’ego ainsi libéré de toute transcendance succombe à ses pulsions destructrices. La fièvre de la dérégulation qui s’empare du monde n’est pas synonyme de libéralisation comme le prétendent les ultralibéraux mais d’abolition systématique des règles et des lois qui ont toujours régi et organisé la société des hommes. Si le clivage traditionnel gauche/droite tournait autour du partage de la plus-value au sein d’une société régulée même si elle soufrait d’injustice, le clivage actuel oppose régulation et dérégulation et laisse présager l’avènement d’un monde chaotique. Mue par la pulsion narcissique de la toute puissance, l’oligarchie mondialiste nie toute altérité et s’engage frénétiquement dans un nihilisme destructeur parachevant de la sorte la trajectoire d’une modernité fondée entre autre sur la divinisation de l’ego, la compétition et la chosification de l’humain. Ce narcissisme délirant, pur produit du messianisme inhérent à l’histoire et à la culture nord-américaine a toujours caracterisé l’élite anglo-saxonne étasunienne. Une élite qui ne cesse depuis le milieu du 19ème siècle d’arborer son Manifest Destiny. A la fin de la première guerre mondiale, Wilson affirmait : « Je crois que Dieu a présidé à la naissance de cette nation et que nous sommes choisis pour montrer la voie aux nations du monde dans leur marche sur les sentiers de la liberté » et George W. Bush d’ajouter en s’adressant à ses troupes au Koweit en 2008 : « Et il ne fait pour moi pas un doute que lorsque l’Histoire sera écrite, la dernière page dira la victoire a été obtenue par les États-Unis d’Amérique, pour le bien du monde entier ». Depuis deux decennies, l’élite ploutocratique en versant dans le néolibéralisme semble irrémédiablement atteinte de perversion narcissique où se mêlent haine et mépris de l’altérité, volonté de puissance, sadisme et manipulation. Une interview du cinéaste américain Aaron Russo (2) enregistrée quelques mois avant sa mort permet de mesurer le degré atteint par une telle perversion. Les guerre menées contre le monde arabe et les restrictions des libertés en Occident annoncent l’univers stalinien dont rêve la ploutocratie étasunienne. Un univers qui rappelle bien “1984″ de Georges Orwell que d’aucuns considèrent comme prémonitoire. Il serait plutôt plus pertinent d’y voir la source d’inspiration des think tank américains dans leur quête totalitaire.
Avec le néolibéralisme, nous passons d’une économie de l’exploitation du travail à une économie de la dépossession. La combinaison de l’endettement public, de l’endettement privé et de la spéculation financière constitue l’outil privilégié de ce hold-up du millénaire. En effet les conditions de remboursement sont arrangées de telle sorte qu’elles ne puissent aboutir qu’à la faillite des débiteurs, qu’ils soient individus ou états. Pratique systématique de l’usure, plans d’ajustement structurel, paradis fiscaux, délocalisations, compétitivité, flexibilité sont autant d’armes pour casser tous les acquis des travailleurs et démanteler les frontières nationales au profit d’une minorité avare de banquiers et de multinationales. Face à une telle escalade, la gauche européenne semble totalement hypnotisée n’ayant probablement pas encore digéré l’implosion de l’URSS. Mais quelle alterntive pourrait bien proposer une gauche qui a toujours hésité à mettre en doute le projet ambigu de la modernité et qui a toujours souscrit au développementisme! En se battant uniquement sur le front du partage de la plus-value, la gauche, de compromis en compromission, a permis au système d’atteindre sa phase finale avec le risque d’ine déflagration tous azimuts.
Face à cette capitulation, l’oligarchie mondiale a renforcé encore plus sa domination en récupérant tout en les pervertissant un ensemble de valeurs libertaires. Elle a su si adroitement profiter du concept cher à Gramsci, celui de guerre de position. En effet, dans les pays Occidentaux, le démantèlement du politique s’effectue non par la coercition mais par l’hégémonie, cette “puissance douce” permettant une domination consentie, voire même désirée. C’est ainsi que l’idéal anarchiste, égalitaire et antiétatiste fut complètement faussé par l’idéologie néolibérale. Les anarcho-capitalistes en rejoignant les anarchistes dans leur haine de l’état, considèrent par contre que le marché est seul en mesure de réguler l’économique et le social. Déjà à partir des années soixante l’idée du marché autorégulateur commençait à prendre de l’ampleur. Le néolibéralisme naissant, rejeton du capitalisme sauvage du 19ème siècle, s’allie paradoxalement à l’anticapitalisme viscéral des soixante-huitards pour s’élever contre l’autoritarisme et prôner une société ouverte et libérée de toutes les formes de contraintes. Ainsi du mythe d’une société sans classes des années soixante dix on succombe au nom de la liberté aux charmes d’une société éclatée faite d’individus atomisés. Ce culte de l’ego, synonyme de désintegration de toutes les formes de solidarité, constitue la pierre angulaire de la pensée anarcho-capitaliste et se reflète dans les écrits de théoriciens tels que Murray Rothba ou David Friedman. Ces derniers n’hésitent pas de prêcher le droit au suicide, à la prostitution, à la drogue, à la vente de ses organes…et vont jusqu’à avancer que l’enfant a le droit de travailler, de quitter ses parents, de se trouver d’autres parents s’il le souhaite…C’est ce champs de la pulsuonalité débridée qui commande désormais les liens sociaux et ruine les instances collectives ainsi que les fondements culturels construits de longue date. Comme le souligne Dany-Robert Dufour (3), Dans une société où le refoulement provoqué par le ” tu ne dois pas ” n’existe plus, l’homme n’a plus besoin d’un dieu pour se fonder que lui même. Guidé par ses seules pulsions, il n’atteindra jamais la jouissance promise par les objets du Divin Marché et développera ainsi une addiction associée à un manque toujours renouvelé. Aliéné par son désir, excité par la publicité et les médias, il adoptera un comportement grégaire, la négation même de cette obsession égotiste qui le mine. Ayant cassé tous les liens traditionnels de solidarité, l’individu s’offre aujourd’hui pieds et poings liés à une ploutocratie avide, sure de sa surpuissance. Si la stratégie néolibérale triomphe de nos jours, c’est bien parce qu’elle a su gagner cette guerre de position en menant à bien son offensive… idéologique.
Mais cette entreprise de désintégration du politique suit tout un autre cheminement lorsqu’elle s’applique aux pays de la périphérie. Le plan du Grand Moyen Orient mis en oeuvre depuis l’invasion de l’Irak et qui continue de fleurir dans les pays du printemps arabe combine à la fois la manipulation et la coercition. Si dans les pays du centre, la stratégie s’appuie sur l’atomisation post-moderne, dans le monde arabe, on tente par la fomentation des haines ethniques et religieuses de désintégrer ces sociétés et de les plonger dans les affres d’une pré-modernité montée de toute pièce. On essaie ainsi de les emmurer comme par magie dans un passé hermétique et prétendument barbare. Voici donc que le monde arabo-islamique se trouve soudainement embarqué à bord de cette machine à remonter le temps tant rêvée par Jules Verne. Egotisme post-moderne et tribalisme barbare formeront ainsi les deux pôles de cette dichotomie diaboliquement orchestrée qui est à l’origine de la pseudo fracture Orient Occident. C’est à l’ombre de ce show du choc des civilisations que s’opère la stratégie du chaos créateur.
Quelques actes terroristes spectatulaires par ci, campagne islamophobe surmédiatisée par là et le décor est dressé. Perversion narcissique et déni de soi, réminiscences de la déshumanisation coloniale, se font écho et s’étreignent. Les invasions occidentales deviennent d’autant plus légitimes qu’elles se prétendent garantes d’une civilisation menacée. A la violence répond paradoxalement la haine de soi et l’autodestruction. Celle-ci se manifeste par des réactions individuelles souvent suicidaires, témoignant d’un malaise social exacerbé face au désordre politico-économique régnant. Dans un pays traditionnellement paisible comme la Tunisie, le nombre des immolés par le feu et par l’eau se compte par centaines. Appeler la mort à son secours devient l’ultime alternative qui s’offre à tous ces désespérés. C’est sur ce fond pétri d’échecs cumulés depuis les indépendances que vient se greffer le rêve morbide de tous ces hallucinés régressifs fuyant la domination d’un Occident mégalomaniaque. L’aube de l’islam, devenue ce paradis perdu de la prime enfance constituera le refuge par excellence car situé derrière le rempart infranchissable et sécurisant des siècles. C’est ainsi qu’une irrésistible quête régressive ne souffrant aucune entrave et se dressant violemment contre toute alternative embrase depuis plus de deux ans le monde arabe. Or ce salafisme aveugle, impuissant face à la domination occidentale, préfère s’adonner à l’autoflagellation. L’Empire n’a pas mieux trouvé que de tourner le couteau dans la plaie narcissique de populations aliénées depuis longtemps par l’oppression coloniale. Il s’agit de raviver cette névrose du colonisé par des menées médiatiques où se mêlent l’offense et le mépris. Tout l’art consiste ensuite à orienter cette explosion de haine vers les présumés avatars locaux de l’Occident et de tous ceux qui de l’intérieur freinent cette marche à reculons. Les gourous islamistes à la solde des monarchies du Golfe et des services secrets américains se sont bien acquittés de cette tâche en poussant au Jihad contre leurs propres nations des dizaines de milliers de fanatiques survoltés. Un superbe gâchis qui en quelques années a fini par ruiner la majorité des pays arabes. Le chaos, faute d’être créateur resplendit par sa cruauté et sa gratuité, mais l’Empire ne fait aujourd’hui que s’enliser de plus en plus dans les sables mouvants de Bilad el-Cham. La forteresse syrienne ne semble pas ceder, cadenassant ainsi la route de la soie et le rêve hégémonique des néoconservateurs. Les dirigeants étasuniens, tout aussi prétencieux qu’ignorants de la complexité du monde arabo-musulman ont cru naïvement pouvoir tenir en laisse tous ces pays en louant les services de la confrérie des frères musulmans.
Après le grandiose mouvement de révolte égyptien et la destitution de Morsi, après la correction infligée à Erdogan et le renversement honteux de Hamad, les frères semblent irrémédiablement lâchés par leur suzerain. Un leurre de plus? Ou alors, comme le souligne le politologue libanais Anis Nakach, les frères musulmans n’ont été hissés au pouvoir que pour mieux dégringoler eux et leur idéologie islamiste devenue totalement contre-productive..pour les néolibéraux. Il s’agit maintenant de remettre le Djinn dans la bouteille et de le plonger dans la mer de l’oubli après qu’il se soit acquitté honorablement de sa tâche. Les masses arabes, après deux ans de désordre sous la direction des frères finiront par se jeter sans hésitation dans les bras des libéraux. Mais une autre raison a certainement réorienté la politique étasunienne : c’est cette ténacité des russes à défendre leur peau coûte que coûte. La prochaine conférence de Genève sur la Syrie changera fort probablement la donne au Moyen Orient en accordant plus d’influence à la Russie dans la région. Le thalassokrator américain, balourd sur les continents, préfère apparemment tenter sa chance ailleurs, sur les eaux du Pacifique…
En attendant, l’incendie qui embrase le monde arabe n’est pas près de s’éteindre de si tôt et les apprentis sorciers, épouvantés par l’agonie de leur vieux monde, continueront d’écraser, dans ce clair-obscur de l’histoire, tout ce qui contrarie leur folie hégémonique. ..
Dans la théorie du chaos, soit le système se transforme, soit il s’effondre totalement. Un simple battement d’aile peut changer le monde semble-t-il…
Fethi GHARBI
Notes de bas de page:
1) 11-Septembre : Susan Lindauer et les bandes vidéo manquantes du World Trade Center
2) Aaron Russo Interview Sur Nicholas Rockefeller
3) Dany-Robert Dufour ; Le Divin Marché – La révolution culturelle libérale
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Nous sommes champions dans la culture de la complexité et de nos réussites techniques qualifiées de « progrès ». Ça nous rassure sur notre prétendue supériorité sur l’existence du singe et des blattes. Les pompeux dirigent le monde. Au delà du champ infini planétaire. En fait, nous ne sommes des tricoteurs d’idoles. Nous sommes quelqu’un si notre voisin et les pauvres, les malheureux, les déshérités de l’esprit sont considérés comme inutiles. C’est ce que disent les arrogants. En cela, nous ne sommes pas mieux que le parti Nazi voulant éradiquer les malades mentaux ou toute forme autre d’existence blafarde que le prétendu racé aryen supérieur. Ne nous étonnons pas de voir les usines-écoles tenter d’intégrer les « différents ». Ce n’est pas toujours pour des raisons humanitaires, mais selon les normes du FMI dans leurs analyses de la « valeur d’un pays ». Puisque la « réussite » de nos sociétés passe par une forme de capital le plus souvent déviée, la VALEUR d’un humain est calculé selon son rendement, mais un rendement qui se plie aux normes des Monsieur Mieux.
Nous sommes maintenant dans un vaste marché aux puces planétaires, prisonnier d’un bric-à-brac informe ou difforme, arachnéen, bavard, échevelé, un bazar d’idées usagées pour un monde qui se prétend nouveau. Nous cherchons que trop à expliquer en délaissant la Vie. Les « spéciallistes » – et quel culte! – sont les représentants certifiés et estampillés fournisseurs de marchandise intellectuelle. Ce qui est complexe est bon et efficace. Ce qui est simple doit être rendu complexe pour pouvoir contrôler les gens simples et délicats.
Nous cherchons des solutions à la vie, alors que la solution EST dans la VIE. Nous nous entêtons à chercher « autre chose », têtus, dans une techno-religion ou une difformité de celles existantes, malheureusement interprétées de manière à ce qu’elle soit moulue aux desseins de ceux qui en font LEUR projet. C’est en voulant devenir « religieusement » des leurs que nous avons fabriqué notre grande défaite sociale.
Gaëtan Pelletier
Publié dans ÉCONOMIE, SOCIÉTÉ, SPIRITUALITÉ, TERRORISME, TOTALITARISME PLANÉTAIRE, VIE
Tagué ÉCONOMIE, Guerres, Philosophie, RELIGION
C’est une découverte pour moi, je vous l’avoue, peu tourné vers le fait religieux par définition (pour l’athée que je suis, c’est une chose sans intérêt). Au détour d’une longue enquête sur l’extrême droite en France (toujours pas parue ici), j’avais mis le doigt sur plusieurs sites approvisionnant les extrémistes antisémites. Beaucoup étaient américains, et Dieudonné s’y abreuvait abondamment : pour preuve sa vision de la traite des noirs, entièrement calquée sur une étude américaine et non sur des sources historiques françaises, ce qu’on décelait rapidement avec les seules références US qu’il citait, en prenant Aaron Lopez comme exemple. Dieudonné est un inculte notoire, dans ce domaine… comme dans beaucoup d’autres, à l’évidence. L’un de ces sites, était celui d’un homme de radio faisant la promotion de David Duke (du KKK) et des pires thèses complotistes (en y mêlant- quel hasard- des OVNIs ou des fantômes, avec son pote Brad Steiger). Celui de Jeff Rense, pour ne pas le citer (quelle allure le mec !), l’homme de radio fascisant, était lui-même visité par de biens étranges personnages, la plupart antisémites ou néo-nazis, dont un bien particulier dont je vais vous parler aujourd’hui pour la simple raison qu’il relaie depuis le 28 janvier dernier les vidéos interdites en France de Dieudonné, au prétexte de la sacro-sainte liberté d’expression américaine, celle qui permet aussi de dire que les camps d’extermination n’ont pas existé. Visite guidée d’un malade mental véritable devenu prosélyte US du dieudonnisme. Bienvenue chez les fous ! Bienvenue chez le supporter américain de Dieudonné !
L’individu (ici en photo à l’œuvre à New-York) ouvre son site pour d’emblée raconter son taux de réussite sur le net, qui ne semble pas vraiment folichon : à l’évidence, ce n’est pas le roi du marketing ! Je rappelle qu’on est aux USA, pays de 320 millions d’habitants. Notre homme débute en effet sa page principale par un appel aux dons d’un genre particulier : « j’ai besoin de votre aide pour continuer, peu de gens m’aident », dit-il en exergue. « J’ai fait un appel aux 3000 personnes qui me regardent, et devinez combien m’ont répondu ? 300 ?
Essayez encore ? 30 ? Essayez à nouveau. Juste 4 personnes, ce qui est très décourageant. Peut-être qu’un jour quelqu’un de très généreux m’enverra 50 000 dollars, pour que je n’ai plus à suer tous les jours et être capable de payer mes traites », écrit notre allumé, en rappelant l’adresse de sa « fondation ». Pitoyable intervention, n’est-ce pas ? Celle d’une forme inédite d’Internet, celle de la mendicité sur le web, avec en prime l’absence totale d’amour-propre chez notre fan de Dieudonné. Une demande d’aide faite par un… SDF, se dit-on, et effectivement, ce doit en être un, à coup sûr.
Ou tout comme : dans le même exergue, il se pose en effet la question lui-même de garder ou non son » toit au dessus de la tête », preuve qu’il n’en a pas toujours un à sa disposition, comme on va le voir plus loin. Le nouveau supporter de Dieudonné dormirait en effet dans les rues de Sarasota, en Floride (son nouveau refuge) quand il ne peut pas payer son loyer ! Il demande également dans le même blog qu’on lui envoie « de la nourriture, des outils », à défaut de « lui trouver une location ». Bref pas le genre d’individu à rouler sur l’or ! L’homme se déguise en prêtre orthodoxe, se fait appeler « frère Nathanael », et sur les clichés, ce qu’on remarque vite, outre son dénuement apparent, c’est sa façon de bouger devant la caméra, caractéristique d’un… psychotique complet ! Un illuminé, total, un mec bon à enfermer, déguisé en prêtre orthodoxe de pacotille… sans église, ou sans monastère, un « prédicateur de rue » comme il se présente lui-même dans son site d’illuminé. Car notre phénomène de foire est bel et bien un cas psychiatrique, ce que révèle son parcours, dans un pays, où, il est vrai on est capable aussi de mettre à mort des personnes atteintes du même mal. Place donc à « frère Nathanael », le nouvel ami (plutôt encombrant !) de Dieudonné !!!
Je n’écris pas pour le plaisir ou par habitude,
j’aimerais bien consacrer du temps à l’écriture du beau,
mais bon, quand le constat de ce qui ne se voit pas me fulgure la face, ça interrompt mon travail, et je suis obligé de l’écrire. C’est Dieu qui veut. Si je ne le fais pas l’idée se perd et parfois, il vient me le rappeler avec insistance (je le vois partout).
Voici ce que je déclare :
Vous êtes une bande d’imbéciles.
Les antiracsistes, les écologistes, les combattants de la paix, les défenseurs de la démocratie réelle, les dénonceurs d’injustice, tous les offusqués du monde, on vous traite comme des imbéciles, et avec raison.
La télé vous dit que vous ne savez pas être heureux alors que c’est si facile.
C’est vrai il suffit de se prendre un job, d’agir bien, de monter les échelons, et d’obtenir une maison avec de la verdure où couler ses jours tranquilles.
Vous lirez seulement le journal le matin pour sous-peser votre bonheur.
Après si vous voulez vous pourrez dénoncer des injustices à la télé, comme quoi les réverbères ils éclairent trop forts, ou réclamer la présence d’un ralentisseur devant chez soi pour éviter les accélérations trop brusques, qui viennent toujours gommer le mot principal de la phrase du dénouement du film.
*
Pourquoi ne voyez-vous pas ce à quoi renvoie les injustices dans lesquelles vous vous êtes spécialisés afin de produire un effet de levier et renverser la cause première de tous ces injustices, les vôtres et celles des autres en même temps ?
C’est l’antifascisme qui m’a énervé le plus.
Cette même réaction épidermique et aristotélicienne ne fait que servir votre ennemi. Son premier réflex est de le retourner en sa faveur et ainsi prendre de la force. Le seule bonne réponse est d’invalider les bases sur lesquelles il se fonde. Déjà à maigre échelle, ça consiste simplement à leur rire au nez, selon la grande vraie tradition française.
Ensuite à longue échelle, ça consiste à faire observer ceci : oui ils ont raison, d’êtres fascistes, parce que dans le système du commerce c’est la meilleure méthode, et donc, c’est la preuve que le système du commerce est inepte.
*
– Souffrir avec l’éradication du biotope,
– être meurtri par l’assassinat d’un arbre en pleine force de l’âge alors qu’il suffirait de prélever le bois bientôt mort,
– voir s’éteindre des espèces animales juste au moment où on se rend compte qu’en fait ils sont humains, ce sont vraiment des humains, avec une âme, un sens artistique, un sens de l’humour, une vie sociale, sauf qu’ils n’ont pas besoin de bétonner le monde,
– constater l’acharnement d’une obsédante avarice qui consiste à vouloir que le sol soit jonché uniquement de tomates rouges conformes au calibre attendu, et de rien d’autre,
toute cette folie a un facteur unique, le système du commerce, dont la finalité s’exprime par l’injuste répartition des richesses, dont résulte ensuite l’accroissement de la démence, car en réalité, l’injustice est une injustice parce qu’elle produit le malheur et la tristesse.
*
La décimation animale d’humanités en devenir est de loin le pire crime, il résonne dans tout le cosmos de façon lancinante ; C’est pour ça que les Ovnis viennent et apparaissent furtivement, parce qu’ils trépignent de douleur.
Et ils savent que si on leur disait que leur démence résonne dans tout l’univers, c’est imbéciles trouveraient le moyen de s’en satisfaire.
*
Je vois a quel point c’est vain de souffrir de l’injustice si personne n’est capable de tirer le fil enfoui sous terre pour savoir où il conduit, et ce qui en est responsable au départ.
Même les gens entre eux agissent d’une manière récréativement ostracisante, avec l’intention d’enseigner la sagesse dictatoriale qui affère au système du commerce, en s’éliminant les uns les autres pour des raisons de domination sur un lieu de travail, fut-il si peu futile que celui de la dénonciation de l’injustice.
Car si on ne respecte pas le calibre de la tomate, son diamètre, sa couleur, son reflet vivifiant, alors les autres concitoyens eux-mêmes l’éliminent, comme s’ils étaient au service de Sa majesté, comme si l’esprit du système du commerce leur promettait, dans un simulacre de bonté, de ne pas leur envoyer la foudre.
Les gens ne se voient jamais que comme des petits gars légion d’une fraction, tant que Sa majesté ne les a pas avalisés. Et une fois avalisés, ils s’empresse de la desservir le moins possible.
C’est pour ça que de nos jours les distinctions sociales ne sont plus octroyées qu’à des gens ou objets déjà avalisés par Sa majesté ; Au moins ça ralentit le massacre des bonnes âmes.
*
Vous vous êtes fourvoyés. Ce monde est perdu, il s’est perdu en route, il est déjà terminé.
Comprenez que vu de l’intérieur de soi-même on n’accède pas à ce que les autres peuvent dire de vous, et que ce rapport entre ces deux endroits est déterminé par le rapport entre la raison et la logique.
La logique est accessible tout à l’intérieur de soi et c’est elle qui produit ce qui peut être vu de l’extérieur.
Les gens de pouvoir de ce monde n’ont aucun compte à rendre ni aucun soupçon de l’existence de ce qui est extérieur à eux, de ce qu’on peut dire d’eux comme de ce que la logique peut dire d’eux. Ils se contentent de gommer les indices, ou de clamer faire l’inverse de ce qu’ils redoutent d’être en train de faire.
C’est tellement désolant de ne pas voir la logique et la raison percer le brouillard et la poussière.
*
Annexe pour bien comprendre,
une vision anthropologique sur soi-même est possible à obtenir en jouant aux poupées avec des extra-terrestres qui découvrent ce monde.
Ils arrivent et disent : « Ouh-la ».
Les mecs sont obsédés, comme embrigadés par une sociotechnique préhistorique, courant sur des ponts qui s’écroulent pour obtenir des fruits pourris, alors que tout ce dont ils ont besoin, ne serait-ce que pour continuer leur activité démente, est à leur pieds.
Évidemment on ne va pas leur dévoiler la moindre solution qu’ils s’empresseront de mettre au service de leur démence.
Le chemin qu’ils ont à parcourir consiste à cueillir les indices qui les conduiront, d’une manière psychoaffective, à aboutir et à s’attacher à la vérité qu’ils vont ensuite découvrir.
Il est inutile de dire que cela doit prendre du temps.
Cependant à la vue de la dégradation observée l’estimation de ce temps produit une valeur négative, faisant observer qu’en ce moment ils s’éloignent de la vérité qu’ils ont besoin de découvrir.
Cela soulève chez nous des interrogations d’ordre cosmique notamment afin de déterminer si c’est l’oeuvre de Dieu ou si l’oeuvre de Dieu veut qu’on leur file un coup de main.
En tout état de cause, en l’absence de volonté et d’énergie du souhait aucune concrétion logique assez pesante ne peut avoir lieu, si bien que nous sommes condamnés à assister au triste spectacle d’une humanité qui se perd, et qui, probablement, comme d’autres, ne passera pas le cap.
Quel spectacle titanesque.
Beaucoup d’entre nous se mettent la main devant les yeux, dans un réflexion néphrétique.
8119
Publié dans Philosophie, RÉFLEXIONS, SOCIÉTÉ
Tagué 8119, HISTOIRE, Humanité, moralité, Philosophie, réflexion, RELIGION
J’étais assis tranquille sur mon arrière-train ( de marchandises) et je me suis dit que c’étaient les américains qui m’avaient « construit » ainsi pour vendre des sièges d’auto. Vu la condition présente de la conduite humaine(?), et vu les programmes de désinfections des ordinateurs qui n’arrêtent pas de s’améliorer- comme le savon à vaisselle des années 50, toujours meilleur- je me suis redit que Dieu existe puisqu’il vend ses créatures Hommes sous forme de programmes obsolètes. La supériorité de l’Homme est à prouver: car nous nous éteignons une fois que la petite chandelle du corps qui soutient la flamme a fini de brûler ses calories, malgré les tentatives de McDonald pour nous ressusciter à coups de frites.
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Image: Paul Signac Dimanche
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Nous sommes des fleurs, d’un temps plus long… D’un temps plus long à souffrir des épines que nous élisons…. De petites minuscules fleurs-poison, serpents à sornettes, bouffons de micros, qui ont amélioré le monde en faisant courir les humains à leur tombeau et en sabrant les dimanches, jour de repos.
Dieu fabriqué à la machine:
L’Homme est devenu un fœtus de paille … C’est l’enfariné abouté au levain des calembredaines mitraillées et martelées.
Ils sont du compost des dieux que l’on chéri. Transitoires. Avant, on donnait aux Églises, aux religions, et aux sectes. Maintenant, c’est aux États. Et les États sont devenues des sectes. L’État fabrique l’Homme, et non plus « dieu ». Il fabrique de la léthargie par hypnose de foules.
God is Gold
Plus de dimanches, plus de repos… On le disait dédié à Dieu. Pourtant, comme disait un humoriste: dieu est né un jour férié. Dieu, c’est Coca-Cola. Dieu est mourant sous la pub éternelle terrestre. Transmise de père en fisc. Dieu est liquide… Dieu, c’est le monde des affaires. Et on est à genoux…
Le déprogrès
L’âge moyen de la créature humaine était jadis de 32 dents. Des prolongations sont maintenant possibles grâces à votre dentiste et à votre banquier. « Empruntez pour mastiquer ». Telle est la devise… En économie, toute devise est américaine… In Trust We God. Le futur est une dette… Le fœtus également…
Dieu, version 1.00.3
– le bug de l’homme qui croit en dieu a été corrigé: il n’y croit plus.
– le singe qui mangeait des fourmis en plantant une tige dans un trou a été amélioré: il a maintenant le missile Tomahawk, guidé à distance et pouvant détruire 3 djihadistes, et 8 civils. L’esclave cravaté et « habillé pareil » ( costumé), imite bien l’autre.
– Le bug de la banane a été lui aussi corrigé: L’humaus travaillus, maintenant pressé, broie un boeuf, après l’avoir tué, écrabouillé, arrondi en « tranchettes », présentés dans une sauce oignon, moutarde, relish ….
– Ses créatures supérieure s donnent 60% de leurs revenus à l’État. Une nette amélioration…. pour l’État. Mais il en donnera 70% si on lui demande. Une nette amélioration …pour l’État. Un jour, ce sera 100 %. Orwell dirait que la dette nous enrichit…
Dieu, version améliorée 2.014.010.02
-Les bugs suivants ont été fixés corrigés:
– Il n’y a plus qu’un seul Dieu.
( Fini celui des étoiles des papillons ( et leur papa, les papapillons), la lumière des plantes, l’or, Marilyn Monroe, John McCartney, You Tube, des Atlantes, de la scie circulaire, Mozart, et les travailleurs de la construction avec les fessiers visibles. Craque, s’entend… )
– Il est en trois personnes: Yahvé, Allah, Jésus. Mais toujours en un. Et voilà la version EI, toute nouvelle… Mieux organisé, en train de se frayer en frayeurs un pays dans un pays. Se construire un État.
Dieu, version américaine: version 2.351.2
Les bugs précédents ont été corrigés:
– Dieu n’habite plus les coquilles d’œufs, mais se promène en Air Force One. Il habite aux États-Unis d’Amérique. Selon certain, il partagerait la couche avec Yahvé. ( Comme dans « Yahvé pigé »).
– La guerre existait dans le jeu de « Dieu », mais elle a été améliorée. Elle est chirurgicale. On ne tue plus, on fait des frappes. Les failles concernant les victimes collatérales seront corrigées dans un siècle ou deux.
– Le Bug Bin Laden a été corrigé et enterré enl’eaulé. Plouf! Dans le tombeau salé. Il a ajouté quelques vagues à la mer… Comme les battements d’ailes des papillons ( snif!).
– Les sages ont le droit de regard, mais pas de parole. On ne dit plus SAGE , on dit FED.
– Le bug du Père, du fils et du Saint-Esprit a été corrigé: CIA, FBI, PENTAGONE. La trilogie schizophrénique qui « taquine » la planète. La tique à cravate qui découvre des Satan à tous les coins de rue.
– L’EI, ( État (?) Islamique (1) a été créé par …( passage caviardé).
Le quantique des cantiques
Et pour terminer, ce superbe cantique de Joe Dassin, terrassé trop jeune, sans doute d’ un complot ourdi par un agent de la C.I.A qui avaient appris la langue de Molière.
Et si tu n´existais pas,L’Homme ayant toute la liberté requise pour créer son programme de « vie », l’Homme dans sa tentative de remplacer « dieu » a décidé de recréer le chaos. Ça va prendre un peu de temps… Il faut travailler les dimanches, la semaine, 24 heures par jour pour revenir au brouillon de dieu. Et le mette K.O. …
En enterrant tout ce que nous consommons, dieu est une ordure… Comme le père Noël.
Ici, les vidanges sont ramassées le jeudi…
Pour une fois, on s’entend…
Le jeudi est le quatrième jour de la semaine civile dans plusieurs pays. Il est le cinquième de la semaine chrétienne, de la semaine juive et de la semaine musulmane. Le mot jeudi est issu du latin Jovis dies, signifiant « jour de Jupiter », à savoir du dieu Jupiter1 ( Wiki)
Il ne reste plus qu’à s’atteler à la récréation (sic) du chaos… Pour refaire de ce faux dieu qu’est l’homme une créature humaine…
Comme dirait Sarko-Mais-Si : « Au panthéon de mes valeurs »….
Gaëtan Pelletier
6 octobre 2014
« Nos yeux écoutent trop le téléphone pour voir ce qu’ils regardent »
Réjean Ducharme, L’hiver de force
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Le petit engrais de l’art
L’art transporte. Quelque part sans aller nulle part que dans la profondeur de son âme. Avec quelques notes de musique, nous grimpons d’un octave, vers quelque chose de céleste, tout vibrés. Avec quelques phrases, nous pouvons marcher un peu plus haut que la terre, frôler d’un cheveu la petite célestitude enterrée en nous par tant de servitude matérielle. Il en est qui survivent par les mots, d’autres par les sons et certains par les images. Mais c’est en vivant de ces formes d’art que l’on arrive à recoller les petits morceaux que nous sommes. C’est là la source de l’échec « continu » de la civilisation actuelle: Travailler n’a jamais tué personne, sauf si on est soldat.
Le délavé citoyen
Nous sommes agité, barattés, comme des T-shirts dans le vrillant tordeur de la laveuse politico-affairiste qui règne. Le roi est invisible. Le travail, c’est la gifle-griffe de la déchirure. Le gros coup de patte des petits ours qu’on couche avec nous dans le lit de nos pays. C’est la « vie » des » occidentards »: avec une bonne rasades de « nouvelles » télévisées d’un monde apo »caca »lyptique, nous finissons avec les nerfs en boules de neige: Plus on roule dans la vie, plus on ramasse l’infecte culture de la nouvelle la plus rouge en ville. Ou ailleurs… Le sang sans soi… La berlue totale! On peinture l’Histoire avec le sang des enfants de Gaza, d’Afghanistan, et pourquoi pas de partout sur la planète? Car de l’intérieur, nos enfants saignent de la petite lumière qu’on éteint. L’argent n’a pas d’odeur, malgré la putrescence des cadavres. L’argent n’a pas d’âme: Quand un de ces petits rois occidentaux vieillit, il est déjà une image. Mort de sa laide mort. Mais restés vivant chez les persistants adorateurs. Il en est qui courent les jupons, d’autres des dieux.
Il faut à tout prix se détendre
Les gens veulent tant se détendre qu’ils sont tendus rien qu’à penser à ce qu’ils vont devoir se détendre. Quand les ancêtres chassaient ou cueillaient, ils dormaient d’un sommeil de plomb. Le misérabilisme à la Zola est maintenant une cassure d’âme invisible. Alors, ça ressemble à un gros trou Grand-Canyon indiscernable. De honte, on le cache. C’est un péché tout nouveau. Un péché de société. Un péché que d’être incapable de s’adapter à cette folie du monde.
Nous avons droit à une industrie de la détente. Florissante des investisseurs, ces fausses fleurs d’humanisme. Un tout petit peu chimio-thérapeutique, mais consolante. La « science » a raison. La science consiste maintenant à jeter dans ses éprouvettes les petits humains toujours en labo. Dire qu’on se plaignait du nazisme et du célèbre Josef Mengele . Depuis, le progrès a fait des citoyens des rats de laboratoires.
Dormir, c’est un peu se pratiquer à mourir
.Dormir, c’est un peu se pratiquer à mourir… Alors, on ressuscite chaque matin, mais parfois au son du cadran. Cette cravache sonore qui vous fouette les oreilles jusqu’au fielleux filament.
Mais voilà que dans un monde pourri nous trempons déjà dans un sachet d’apocalypses infusé dans des eaux boueuses. La tisane de la vie est devenue un mignon poison aux millions d’abonnés. Tout simplement parce que l’on cultive le cauchemar au point de se tordre le jour, tout en douleurs et ensuite passer des nuits à se rappeler le jour.
En quelques décennies, la petite vie tranquille du citoyen est charcutée au tordeur de la mondialisation. Les emplois ont la durée des roses. Et dans la course au bonheur, il faut marathonner pour être « heureux ». C’est la loi du saccadisme! Tout est saccadé, énervé, désernigé, … On arrive à bout de souffle à 40 ans pour mourir à 80 avec un peu de chance et beaucoup de cette pompeuse pharmacologie. On boîte son pèlerinage de la vie dans le doucereux magma de Big Pharma. Si c’est bon pour souris, c’est bon pour nous, les rats réels raëliens.
La vente de paysages
C’est risible de voir ce petit bourgeois qui, un fois la peau séchée, s’achète des paysages, des fleurs, des jardins, des flaques d’eau, des couchers de soleil à des prix d’or. Il se déclare contemplatif, alors qu’il a passé une vie agitée pour tout cet attirail de « bien-être » à la mode.
Le bourgeois du 21 ième siècle a besoin de remplir la cavité de son âme. Comme tous ses semblables qui sont passés avant lui. Mais à la différence qu’aujourd’hui, ils sont victimes d’une sorte de propagande sournoise, insidieuse, captive comme dans deses bateaux de négriers modernes et invisibles: celle des écrans de télévisions polluées par des bandes passantes et des pubs qui pulsent les écrans. Cible: subconscient. La sale culture du parfait délavé.
Il est passé, nous sommes passés, de la caverne au bureau astiqué et fade. Des fleurs, des étoiles, des eaux, de la beauté, à la cruauté des « sans paysages » libres. Les usines étouffoirs. Les tours étouffoirs. Les projets étouffoirs. Ainsi que la petite chaîne strangulaire du citoyen « austérisé ». On s’y habitue…
L’humain est baratiné comme une crème pour en faire du beurre-serviteur. Il faut acheter ce que nous avons perdu et acheter ce que nous n’avions pas.
Beau progrès!
La cuisine du Dr cuistot
On a jamais autant vendu de livres pour accéder au « bonheur »: Yoga. peinture, d course, bicyclette, art de bouffer, art d’acheter, de placer son argent, de se projeter dans le futur. Tout est art dans une diarrhée de produits à vendre. Des parfums, des massages, des recettes, du zen, des pensées positives, et la sublime respiration par le nez… La liste est si trop longue, mais quelqu’un y gagne à l’allonger.
IL FAUT SE DÉTENDRE! S’il faut autant se détendre, c’est que la vie que nous menons est une duplicité cryptique qu’on ne verra pas en écoutant les « nouvelles ». Et que l’on ne vivra pas dans un décor intérieur accidenté. Nous sommes des accidentés en miettes d’un accident de parcours.
On lit sans savoir lire. Pressés. On lit sans apaisement. Les hémorroïdes des neurones. En feu! Irrités d’impatience.
Après 50 livres, vous savez tout, mais vous ne savez pas comment le faire, mais surtout vous n’avez pas le temps de le faire. Alors, vous cherchez un autre livre.
Le livre, c’est comme le Big Pharma de l’esprit.
Comme disait Ghandi: « Il faut faire le tour de soi dix fois ». On se rend compte que quelqu’un veut vous offrir un fleuve… Mais nous sommes tous une petite source qui doit apprendre à grandir pour retourner à la fraîcheur de la source. Si on laisse les États continuer de s’allier autant au « marché », à la bourse.
Il est anormal d’essayer autant de se détendre. Et c’est là le constat de l’échec des sociétés occidentales: on a tout, mais il ne nous appartient pas vraiment. C’est le siècle de l’éphémère. Tout nous échappe, même la tranquillité promise, la paix promise.
Les promesses s’en vont à la vitesse des politiciens….
Détendons nous… Il y en y en aura d’autres pour « passer au suivant » la méthode du menteur.
Un seul artiste, un vrai, peut donner à l’humanité plus que l’ensemble des politiciens, des hommes d’affaires, et des artificieuses organisations planétaires se disant au service de l’Homme…
Gaëtan Pelletier
Août 2014
Publié dans Arnaque, ÉCONOMIE, FOI LAÏQUE, RELIGIONS, SOCIÉTÉ, SPIRITUALITÉ, VIE
Tagué Arnaque, art, ÉCONOMIE, citoyen, RELIGION, SOCIÉTÉ, SPIRITUALITÉ, vie
Ce ne sont pas les mots, ce sont les choses simples de la vie. Le sens du monde dans une vaine recherche ne mène pas au bonheur, mais à disséquer un ensemble pour tenter de le reconstituer. Comme s’il fallait comprendre pour être heureux… Comme s’il fallait tailler un TOUT en morceaux et reconstituer.
Il faut seulement être simple. E t c’est de plus en plus difficile, parce que nous avons appris à disséquer nos malheur, à nous faire disséquer comme si la simplicité était une maladie de la Vie. Comme si ce n’était que le moyen « d’être heureux ».
Nous accordons tant d’importance à l’intellect et à ceux qui croient que l’intellect peut régler nos « problèmes » c’est que notre ignorance provient justement du fait que c’est cette accentuation de l’importance de l’intellect qui a détruit et qui continue de détruire nos vies.
Il n’existe pas de science du bonheur… Il existe une philosophie de vie qui consiste à accepter l’incompréhension et le mystère, les misères, le travail, et si vous trouvez que le Hamburger de McDo est empoisonnant, les analyses, les débats, les guerres, les faux-culs élus, sont bien plus terribles et davantage tueurs cachés sous un amas de simagrées.
Et je passe la croûte sèche des arnaqueurs qui s’amusent avec la sueur des peuples, menteurs et trafiquants de vérité.
Un X est une croix trafiquée…
Le pire poison est bien la complexité de ce que nous avons créé au nom du « savoir » qui est une ignorance abyssale. Entre vivre vivre pour le savoir se trouve un volcan qui va nous anéantir.
Nous en sommes à refaire le coup du dinosaure mais par suicide collectif.
Nous sommes des mailles qui semblent n’avoir pas su tricoter un tissus humaniste. On peut bien se glorifier de nos « sciences », des lobes du cerveau, mais notre anéantissement sera le fait d’un labeur oublié de nos âmes et du « tout ensemble » pour les semailles. On ne défriche pas une terre et la cultivons un par un.
Celui qui est nourrit doit porter un peu de cette « misère » qui – hélas – fait partie de nos vies. On aura bien tenté d’y échapper. Même par la robotisation – vite achetée par les « moneymakers ».
Gaëtan Pelletier
Mai 2014
Publié dans Arnaque, ÉDUCATION, COLONIANISME 2, Coups de gueule, CRIME ÉCONOMIQUE, GLOBALISATION, NÉOLIBÉRALISME, ORWELL, Philosophie, RÉFLEXIONS, SOCIÉTÉ, SPIRITUALITÉ, TOTALITARISME PLANÉTAIRE, Univers, VIE
Tagué cosmos, réflexion, RELIGION, sciences, SOCIÉTÉ, SPIRITUALITÉ, vie