Les 250 ans de la bataille des plaines d’Abraham
2000 soldats assiégeront le parc en 2009
Québec, le 28 mai 2007 – La Commission des champs de bataille nationaux a annoncé ce matin la mise sur pied d’activités gratuites de commémoration du 250e anniversaire de la célèbre bataille des plaines d’Abraham qui changea le sort de l’Amérique tout entière, incluant l’affrontement qui a suivi quelques mois plus tard : la bataille de Sainte-Foy. Du 6 au 9 août 2009, les plaines d’Abraham replongeront en 1759-1760 avec plus de 2000 « reconstituteurs » historiques qui établiront des campements d’époque à visiter par le public et participeront à deux affrontements plutôt qu’un sous l’oeil des descendants du général James Wolfe et du marquis de Montcalm. La plus imposante reconstitution du genre au pays, indéniablement l’événement de l’été 2009 à Québec. (Communiqué du gouvernement du Canada).
AVANT PROPOS
Elle n’a pas eu lieu la reconstitution de cette célèbre bataille. Mais j’ai tiqué. L’idée du siècle…
Ouah! Elle m’est tombée sur la tête comme la pomme de Newton. Adam et Ève. Ce n’est pas très éloigné… Le jardin bleu du bien et du mal.
CHAPITRE 1
Linda et moi étions divorcés depuis cinq ans… Mon ex, me coûtait une fortune en pension alimentaire. Il me fallait trouver une solution pour régler ce sempiternel problème.
J’étais fébrile, quasi fiévreux à l’idée de lui parler de mon projet : reconstituer la scène qui nous avait menés à notre divorce. La raison : en faire un mini spectacle pour une levée de fonds dans le but d’en finir avec nos dettes mutuelles. J’étais prêt à lui donner tout le contenu de la caisse pour me débarrasser de ce fardeau.
Il fallait d’abord convaincre la présente conjointe, Sharon.
Elle sourit. Rien ne lui faisait plus plaisir que de se débarrasser à jamais de cette plaie , nommée X WOMAN ,qui me harcelait.
CHAPITRE 2
J’ai donc contacté Linda et lui ai proposé mon plan.
Elle est restée muette un moment. Puis elle a éclaté d’un rire fou… J’ai dû attendre un peu, avant qu’elle ne s’en remette. Un grand silence… Et de beaux yeux encore troublants.
– Ce n’est pas bête! Tu es toujours aussi cinglé…
– Il faut s’en sortir un jour… Je parle de ce divorce…
– Comment procéder?
– On va écrire le scénario… à deux. Il y a des bouts dont je ne me souviens pas.
– Moi non plus…
– Où?
– On commence la semaine prochaine… Et on envoie des faire-part.
Elle a failli s’étouffer. Mais j’ai senti que ça l’excitait. Linda est une latine folâtre, passionnée, toujours dans des bouillonnements chauds qui, je dois le dire, m’ont consommé. Je suis un grand brûlé du mariage…
CHAPITRE 3
Comme dirait Proust, «nous nous rencontrâmes dans un petit resto afin de délier les nœuds de nos amours en convulsions, qui finirent par se tordre jusqu’au point de rupture notre liaison d’une brûlure à faire frémir un pompier de calendrier.»
Il fallait d’abord trouver le «fait» central, le «tueur», qui avait assassiné notre amour.
Elle me rappela le moment où elle avait quitté la maison pour prendre soin de sa mère en me léguant un plan afin de refaire un aménagement paysager. Content d’avoir un peu d’«espace entre nos êtres», comme disait Gibran, j’ai poussé un peu sur la liberté. En fait, j’ai tout simplement fait une grosse partouze avec les gars et je les ai payés avec de la bière pour «travailler». Ils ont suivi le plan à la lettre, sauf que la plupart ont perdu le nord. De sorte qu’une fois terminé, l’avant de la maison avait l’air d’une robe d’été fleurie, mais déchirée.
Linda est revenue à la fin du party. Mais elle n’en n’est pas revenue…
Après l’engueulade, les œufs lancés, la cuisine charcutée, la maison était un champ de bataille : une peinture de Pollock.
– C’est fini, je m’en retourne chez ma mère.
– Je ne veux pas t’insulter, mais j’ai souvenir d’une réplique de film : «Ta mère est décédée depuis 6 ans… »
Nous sommes passés chez le notaire. D’où les sommes…
CHAPITRE 4
Mais «l’écriture» du scénario fut plus longue que prévu. Comme dans l’Histoire, les bons moments finirent par se mixer aux mauvais. Mais le mauvais, une fois «couché» sur papier, nous amena à revivre quelques plaisants instants hors papier… Les plus grandes catastrophes font les meilleurs films…
On a fêté ça comme deux bouteilles de champagne qui se sabrent mutuellement les bouchons en pétarades dans des chambres d’hôtels :Bang! Au plafond! On pétait les plombs à coups d’arquebuse.
C’était… Comme avant.
J’en oubliai ma flegmatique Sharon qui m’attendait chaque jour avec son sourire placide, ses dents blanches, et sa coiffure étudiée. Fade comme une tirelire vide…
Je pense que j’aimais Linda pour son esprit combatif… Pour sa pétillance, son embrasement, sa flamme. On avait toujours fait l’amour comme une bataille… Le lit pourrait en témoigner… Après tout, on va toujours revoir les champs de bataille après des siècles…
L’amour et la guerre n’ont de différent que dans l’un on fait des enfants et dans l’autre on les tue.
CHAPITRE 5
La représentation.
Nous suivîmes le scénario à la lettre. Jusqu’au moment où Linda, enragée et déboussolée, finit par confondre la réalité et l’entreprise théâtrale : elle s’empara d’un couteau dans un tiroir de la cuisine reconstituée… Mais ce n’était pas un faux. Le hasard fit en sorte que dans la vie tout s’arrange… Ou presque. Car nous étions rendus au moment où voulant me dégriser du party je buvais une chopine de jus de tomate : du V8. Ça vous siphonne un réservoir….
La chopine fut fendue sur un air de la 9ième de Beethoven, le sang éclaboussant la pièce.
Nous eûmes droit à une ovation debout. On applaudissait à tout rompre. La salle était en liesse. C’était plus beau que la réalité… Plus étoffé, plus prenant… Tous les spectateurs nous regardait ébahis, l’un d’entre eux nous filma pour le légendaire You Tube et son «brodcast yourself» .
Elle lâcha son couteau, s’effondra en larmes et articula sa dernière réplique, pas prévue…
– Salaud, je suis enceinte…
Ce fut le délire dans la salle.
C’est à ce moment que je pris conscience que pour nous en sortir encore, il fallait réécrire l’histoire.
Mais nous devions attendre encore des années avant que l’on oublie le scénario.
J’étais déconfit.
CHAPITRE 6
C’est en arrivant à la maison que j’ai eu droit à une seconde guerre. Sharon – je ne vous l’ai pas encore dit – est anglophone. Avec ses cheveux roux et ses grands yeux de guerrière, elle me lança, en hoquetant de colère :
– You, Son of a B****!|
Il me restait Clara, une petite foncée timide aux yeux de noisette. Ou encore, Angèle, une blonde incendiaire qui ne cessait de me faire de l’œil au travail.
C’est ça la différence entre l’amour et la guerre : dans l’amour on se fait des scénarios plaisants avant, dans la guerre on se fait des scénarios plaisants après.
Voilà la raison pour laquelle que je paye autant de pensions alimentaires qu’il y a de pays, de divisions dans les pays, et de répétitions «reconstituées».
Là, je venais de comprendre que les guerres sont d’énormes pensions alimentaires qui tournent en rond par des passions qui se soudent et se divisent continuellement.
Si on ajoute à ça tous les cocus… Je pense qu’on ne peut même plus divorcer de son pays…
Il n’y a plus de citoyens.
Rien que des cocus qui s’appauvrissent en payant des pensions alimentaires à des politiciens qui couchent avec des banquiers.
On reconstituera plus tard…
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P.S : C’est avec ça que roule le « capitalisme »… La scission entre citoyen-État est une épave.
Reste un volant, M. Charest…